La distance personnelle : la clé de la protection personnelle

La protection personnelle est souvent mal comprise. Cette incompréhension donne lieu à des débats passionnés sur l’opposition sports de combat/ arts martiaux/ self-défense. Souvent d’ailleurs, cela se termine avec un duel entre deux types de pratiquants qui tournera systématiquement en faveur de celui qui s’entraîne dans les règles du duel en question. Pourtant, ces problématiques me semblent peu intéressantes et les énergies dépensées dans ces débats perdues pour rien… En effet, la particularité de la protection personnelle est qu’elle se déroule dans la distance personnelle ce qui n’est pas le cas dans les autres situations. C’est à cela que nous allons nous intéresser dans cet article.

La différence entre le sport de combat, l’art martial et la protection personnelle lors du combat

La différence majeure entre l’art martial, le sport de combat et la protection personnelle est le choix. Que ce soit lors de l’art martial ou du sport de combat, les différents protagonistes sont tous là par choix. Ils ont tous accepté à un moment donné le combat. Aucun problème avec ça mais la conséquence est qu’ils se trouvent à une distance adaptée au combat.

Le fait que cette distance soit grande et/ ou qu’on soit préparé à l’affrontement dans les arts martiaux et sports de combat fait qu’il faut déployer une grande technique/ tactique et une grosse condition physique pour surpasser l’adversaire (ou une meilleure arme).

Les différentes distances dans les arts martiaux et sports de combat

Toutefois, ce n’est absolument pas le cas de la protection personnelle. En effet, dans ce type de situation, l’agression nous est imposée. Nous ne sommes pas spécialement prêts à cela et l’attaque se fait à une distance trop proche pour une réaction construite. Cependant, une agression n’arrive que rarement de nulle part et le meilleur moyen de l’éviter et de refuser l’entrée à la distance personnelle.

Dans cette vidéo, l’agresseur réussit à rentrer dans la distance personnelle des victimes par une escalade rapide. On remarquera que malgré son avantage tactique ( son arme), il n’attaque que dans la distance sociale.

 

Que sont les distances sociales ?

Les distances sociales sont les distances de communication. On peut les subdiviser selon la proxémie en distance publique, sociale personnelle (entre 45 cm et 120 cm qui est celle des conversations personnelles) et intime.

 

Les différentes distances sociales

Selon Hall, un psychologue ayant étudié la question, ces distances ont un rapport à la gestion de notre territorialité. En fonction de ces distances, on tolèrera des personnes avec qui nous avons une interaction plus ou moins proche (ici pour en savoir plus).

Cette territorialité fait que socialement, nous ne restons pas proches d’une personne qui nous est désagréable. A l’inverse, nous laissons entrer dans cette zone les gens avec qui nous acceptons d’avoir une interaction sociale. Or aucun combattant ne laisse rentrer son adversaire dans cette distance sans préparation (garde). Pourtant, l’agression démarre à cette distance-là (et que rarement avant). Comment ? Par manque d’attention ou alors une escalade sociale rapide permettant de vous isoler dans votre zone sous prétexte d’une interaction sociale.

Comment travailler la distance personnelle?

Il est important de prendre conscience de la distance personnelle et de la distance sociale. Une bonne gestion de ces distances permet ainsi de s’apercevoir rapidement qu’un individu potentiellement dangereux est dans notre espace.

Travailler cela est assez simple. Laissez un partenaire tourner autour de vous en partant d’environ 4 mètre et se rapprocher en cercle de vous. Essayez de sentir l’augmentation du niveau de malaise pour déterminer votre zone. Maintenant, pour sentir s’il y a un danger, restez à l’écoute de ce niveau de malaise. Pour faire varier ce niveau, le partenaire doit venir pour vous frapper en mettant de l’intention. S’il a du mal, faites-lui simplement tenir un couteau dans la main, cela augmentera le malaise. Faites également cet exercice les yeux fermés, vous verrez également que le malaise est ressenti de la même manière.

Comment l’exploiter ?

Vous observerez rapidement que le malaise est beaucoup plus fort lorsque l’agresseur arrive en face alors que c’est plus faible, lorsqu’il arrive par un côté. Pensez que l’agresseur potentiel à la même sensation. Ainsi, simplement par le déplacement on peut le gêner dans son escalade sociale qui lui permet de rentrer dans cette zone. Le maintien de l’agresseur dans la distance sociale permet également de désescalader verbalement en cherchant à lui retirer son justificatif d’action.

S’il parvient dans la zone personnelle, deux solutions, les frappes pré-emptives ou une très grande réactivité corporelle grâce à une bonne « écoute » par le contact physique. Néanmoins, à cette distance, les deux sont très compliquées. Dans le premier cas, cela implique de frapper avant l’apparition du danger physique avec une grande détermination voire avec un objet donnant un avantage énorme. Le résultat c’est un énorme risque légal à gérer ensuite. La deuxième est de prendre un (trop) grand risque en laissant l’initiative. Comme le dit Vladimir Vasiliev, dans le doute, frapper d’abord, excusez-vous ensuite… Dans les deux cas, le but est de frapper et sortir. Une fois sorti, il sera beaucoup plus difficile de retourner à l’agression, on passera alors éventuellement à du combat si les deux décident de rester sur place.

Conclusion

Travailler cette distance et apprendre à bouger dans cette distance avec un agresseur potentiel me paraît central dans une bonne pratique de protection personnelle. Le seul moyen de s’en sortir dans une vraie agression étant de contrôler l’entrée dans cette zone et sa gestion. C’est ainsi que l’on peut comprendre pourquoi la comparaison avec les techniques de combat est vaine. Elles ne s’appliquent pas à ce type de situations. Pour illustrer cela, le seul moment où une stratégie de protection personnelle est applicable dans un ring serait la frappe pré-emptive au moment où l’arbitre énonce les règles. Cela dit, le meilleur moyen est encore de ne  pas s’y pointer…

3 commentaires

  • Natrang

    Je viens de lire votre nouvel article et je dois dire que je suis une fois de plus admiratif de la pertinence de votre propos, et je tenais à vous féliciter pour la qualité de votre site.
    J’ai découvert le systema il y a un an environ après une assez longue pratique des arts martiaux et du jjb en particulier. Votre site a cette richesse particulière de faire jonction entre le monde de la défense personnelle /arts martiaux /sport de combat et de ce que l’on y recherche par le biais de ces articles toujours argumenté et rationnels.
    Merci et continuez ainsi !

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