
Attention au Rear Neck Choke!
En faisant des recherches pour un article, je suis tombé sur ce case report d’un patient pratiquant le jiujitsu brésilien blessé sur un rear neck choke. Ce pratiquant s’est fait une dissection de l’artère carotide interne. Cette étude a été publiée dans le journal: Journal of Cerebrovascular and Endovascular Neurosurgery. J’ai trouvé intéressant de la partager pour faire un peu de prévention.

Le Rear Neck Choke
Le Rear Neck Choke (RNC) ou Mata Leon est en jiujitsu brésilien ou grappling en général est un étranglement sanguin permettant de rapidement faire tomber dans les pommes l’adversaire. Pour cela, on compresse les artères carotides de façon bilatérale pour stopper l’arrivée du sang au cerveau. Même en cas d’évanouissement, cette technique est relativement sûre à condition d’immédiatement relâcher la prise pour neutraliser quelqu’un. Sa mise en oeuvre est également assez rapide. Placer cette technique demande une grande supériorité technique par rapport à l’adversaire puisqu’elle implique de réussir à prendre le dos, verrouiller la position, et placer la technique malgré les bras de l’adversaire. Par conséquent, elle a une grande réputation.
Paradoxalement, cette technique est peu dangereuse quand placée à un néophyte parce que globalement il va soit paniquer, soit ne se rendre compte de rien puisque ce n’est pas une technique vraiment douloureuse, on finit juste par perdre conscience (déjà vécu plusieurs fois…). A l’inverse, un pratiquant aguerri va tenter tout son possible pour sortir de là et en fait, le danger réside dans la tentative de sortie.
En effet, cette technique compresse les artères mais en même temps réduit l’espace entre elles et les structures solides, réduisant leur capacité de déformation. La pression sur les les artères est donc très augmentée et leur capacité à s’y adapter très réduite. Toute tentative de sortie va donc mettre à rude épreuve la capacité de résistance de ces artères.
Le cas d’un pratiquant de jiujitsu
Un pratiquant de jiujitsu brésilien professionnel au Brésil, de 27 ans a subit une dissection de l’artère carotidienne gauche. L’athlète était en bonne santé, sans antécédents particuliers ni facteurs de risque particulier si ce n’est la prise d’anabolisants. Il s’est présenté aux urgences avec une aphasie, un déficit moteur du côté droit du corps et des maux de tête sévères, ces symptômes ayant commencé 16h avant son arrivée. Une semaine avant, il avait subi un rear neck choke dont il s’est sorti mais lui laissant une douleur importante dans le cou.
Le diagnostic a été posé rapidement et l’imagerie a confirmé la dissection de l’artère carotide gauche. A la fin de la journée, il perdait connaissance. Il a subit une intervention lourde qui l’a au final laissé handicapé du côté droit, l”obligeant à arrêter la pratique.
La cause de la dissection aortique
Le RNC crée un point de compression de l’artère carotide puisque l’on cherche à empêcher le sang de monter au cerveau. En plus de ce point de compression, la pression que l’on met avec la poitrine et les bras réduit les degrès de mobilité du coup faisant que le point de compression est difficilement mobilisable. En même temps, c’est le but de la technique…

Pour sortir, le pratiquant a étiré le cou créant une pression importante sur le tissu de l’artère alors en extension. Ensuite, via une rotation controlatérale pour essayer de sortir, les forces de cisaillement ont entraîné la dissection de l’artère.
Le problème supplémentaire est que parfois, comme ici, les symptômes immédiats ne sont qu’une douleur locale. Or, les douleurs au cou ou au dos ou autre sont communes en jiujitsu brésilien. Les symptômes neurologiques se manifesteront en général trop tard, suite à l’embolie que crée la dissection.. Malheureusement, à ce moment-là, les conséquences sont déjà dramatiques.
Conclusion
Ce type de dissection aortique a également été décrite en MMA mais aussi Karate et Taekwondo. Néanmoins, ce n’est pas une blessure propre au rear neck choke. Le même phénomène pouvant avoir lieu suite à une frappe. Cependant, ce ne sont pas les plus communes. En effet, le même type de problème est beaucoup plus fréquent au niveau des artères vertébrales. Des cas existent en MMA, Lutte, Judo, Karate, Wushu et Taekwondo. Les décès surviennent dans 3-4% des cas, dans 75% les survivants s’en sortent avec des séquelles acceptables. Néanmoins, tout dépend de la précocité de la consultation. Les auteurs recommandent en cas de douleurs prolongés dans ces zones de consulter le plus tôt possible. Ils recommandent aussi aux coachs de faire attention à ne pas prolonger les compressions trop importantes.
Le côté fun et globalement sécurisé du jiujitsu brésilien peut entraîner une disproportion de l’engagement par rapport à l’enjeu. Ceci augmente donc le risque de blessures. Il est important de savoir abandonner pour les éviter. Néanmoins, les profs devraient beaucoup plus sanctionner le manque de contrôle de certains sur les mouvements dangereux. La sécurité des pratiquants (de tous les pratiquants, pas juste ceux qui font une compétition) devrait être la première préoccupation du coach.
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